
Une équipe du Musée d’archéologie de Londres (MOLA) a mis au jour un lit funéraire en bois intact d’époque romaine sur un chantier de construction au coeur de Londres. © Museum of London Archaeology
Lors des fouilles de sauvetage menées près du viaduc de Holborn à Londres, des archéologues britanniques ont exhumé un lit funéraire romain en parfait état de conservation. Cette pièce de mobilier en bois massif a vraisemblablement été utilisée pour transporter un personnage de haut rang jusqu’à sa dernière demeure.
Dans un communiqué publié le 5 février 2024, le Musée d’archéologie de Londres (MOLA) a annoncé la découverte d’un lit funéraire intact d’époque romaine sur un chantier de construction situé non loin du viaduc de Holborn à Londres. Les fouilles ont pour objectif d’explorer une zone encore inconnue de la capitale de la Bretagne romaine, avant l’aménagement des futurs bureaux du cabinet d’avocats Hogan Lovells. En excavant le site, les archéologues du MOLA ont mis au jour le premier lit funéraire romain complet de Grande-Bretagne. Leurs travaux ont également révélé cinq cercueils romains en bois, des ossements humains et un riche mobilier funéraire.
Le premier lit funéraire romain complet de Grande-Bretagne
Le site fouillé par le Musée d’archéologie de Londres est bien connu des chercheurs. Exploré dans les années 1990, il se trouve à l’extérieur de l’enceinte de l’antique cité de Londinium, à six mètres sous le niveau du sol moderne. Il s’agirait du dernier « lieu de repos de certains des premiers habitants de la Londres romaine ». D’après les archéologues du MOLA, la découverte d’un lit funéraire de ce type est incroyablement rare. Si trois cercueils en bois datant de l’époque romaine (43-410 apr. J.-C.) ont déjà été trouvés à Londres, c’est la première fois qu’un lit funéraire complet est mis au jour en Grande-Bretagne.
Soigneusement démonté et rangé, ce lit funériaire en bois découvert à Londres était probablement destiné à être utilisé dans l’au-delà. © Museum of London Archaeology
Menuisé en chêne de haute qualité, le lit est doté de pieds sculptés et a été assemblé au moyen de petites chevilles en bois. « Il a été soigneusement démonté et rangé, un peu comme un meuble en kit pour une prochaine vie », précise Michael Marshall, spécialiste des artefacts antiques chez MOLA. L’équipe de fouille pense en effet que ce lit funéraire était destiné à être utilisé dans l’au-delà. Il a sans doute également servi à transporter un défunt de haut rang jusqu’à sa sépulture, comme c’était la coutume dans le monde romain.
Des ossements humains, des cercueils en chêne et de riches objets funéraires
Lors de cette fouille londonienne, les archéologues du MOLA ont aussi découvert des ossements humains, cinq cercueils en chêne massif et de précieux artefacts funéraires. Des perles de jais et d’ambre, une fiole en verre et une lampe à huile ont été trouvées dans une sépulture à crémation. La lampe a été datée du début de la période romaine en Grande-Bretagne (entre 48 et 80 apr. J.-C.).
Le décor de cette lampe à l’huile découverte dans une tombe à crémation revêt une symbolique funéraire forte. © Museum of London Archaeology
Elle est décorée d’un motif de gladiateur vaincu, qui revêt une symbolique funéraire forte. Selon Michael Marshall, ce combattant représente un individu en train de mourir, mais qui lutte aussi contre la mort. Les chercheurs du Musée d’archéologie de Londres ont également mis au jour des puits bordés de bois, des sols en craie appartenant à un atelier de tannage des années 1200 et des traces d’un cimetière du XVIe siècle.
Une découverte éclairant les pratiques funéraires de la capitale de la Bretagne romaine
La mise au jour d’artefacts en bois d’époque romaine demeure relativement rare. Le lit funéraire de Londres a été conservé en raison de son enfouissement dans une épaisse couche de boue humide. La zone fouillée, localisée sur les rives de la Fleet, s’apparente en effet à un site lacustre.
En menant des fouilles préventives dans le cadre du chantier du futur TGV britannique, des archéologues ont découvert en juillet 2021, près de Twyford dans le Buckinghamshire (Angleterre), une statuette en bois qui daterait de l’époque romaine. ©️HS2
Cette découverte est capitale pour la compréhension des pratiques funéraires en usage à Londinium et en Bretagne romaine. Les archéologues ont pu confirmer que les Romains de Grande-Bretagne enterraient leurs morts le long des routes, à l’extérieur des villes. Ils ont également pu mieux appréhender les rites propres à cette province de l’Empire romain. Les habitants de la Londres antique inhumaient donc certains de leurs défunts dans des lits funéraires.
Reproduction en plâtre des bas-Relief de la tombe des Haterii, IIe siècle apr. J.-C., présentée à la Staatliche Antikensammlungen und Glyptothek de Munich (les originaux sont conservés au musée du Vatican). © Wikimedia Commons / Mark Landon
Certaines sources écrites et iconographiques témoignent de l’utilisation de lits dans les cortèges funéraires romains, comme le célèbre relief de la tombe des Haterii à Rome (IIe siècle apr. J.-C.). Pour l’archéologue Michael Marshall, c’est une véritable surprise de trouver une trace de ce rite en Bretagne romaine : « Nous ne savions pas du tout que des personnes étaient enterrées dans ce type de lit funéraire romain. C’est une chose pour laquelle il n’existe aucune preuve antérieure en Grande-Bretagne ».