Le dragon demeure un symbole sacré dans l’esprit des Vietnamiens. Ceux-ci, où qu’ils se trouvent dans le monde, sont toujours fiers de leur origine en tant qu'"enfants du Dragon et de l’Immortelle".
Selon les croyances des peuples de l’Orient, le dragon est constitué des caractéristiques de neuf animaux différents : ses cornes ressemblent à celles du cerf-cochon, sa tête à celle du chameau, ses yeux à ceux du lapin, son corps à celui du serpent, son ventre à celui du sinanodonta woodiana, ses écailles à celles du poisson, ses orteils à ceux de l’oiseau, ses pieds à ceux du tigre et ses oreilles à celles du bœuf. Grâce à cette unique combinaison de traits, l’animal fabuleux est considéré comme le souverain des animaux.
Incarnation du génie
Le dragon, un symbole sacré dans l’esprit des Vietnamiens. Photo : VNA/CVN
On croit toujours que le dragon est l’incarnation du génie, le symbole de l’univers moniste.
Il représente la convergence entre le yin et le yang, entre le ciel et la terre, avec des influences directes sur la riziculture, le métier le plus ancien des Vietnamiens, qui repose sur deux éléments naturels fondamentaux : la terre et l’eau.
Le dragon est porteur de chance, de prospérité et d’intelligence. Cet animal sacré est considéré comme un ambassadeur auquel la population confie ses aspirations à la pluie et à une récolte abondante.
On peut observer divers motifs, tels que le dragon absorbant l’eau de la Mer Orientale pour irriguer la terre, les carpes se transformant en dragons en franchissant la porte, le dragon châtiant les personnes malveillantes pour protéger la population…
L’animal fabuleux est souvent utilisé comme décoration dans les monuments architecturaux importants du pays, les pagodes et les temples, ce qui témoigne son influence dans la société vietnamienne.
À travers les époques
Le dragon symbolise l'univers moniste. Photo : VNA/CVN
Depuis très longtemps, le dragon est omniprésent dans la vie des Vietnamiens, notamment dans les tatouages. Selon les livres chinois Le Huainanzi et Le Shanhaijing, les Viêt appliquaient des images de l’animal sur leurs cuisses avant d’entrer dans l’eau pour éviter les attaques des crocodiles. Cet usage perdura jusqu’au règne du roi Trân Anh Tông (1239-1314).
À l’époque des rois Hùng (2879-258 avant J. C.), le dragon était souvent gravé sur les objets en bronze, notamment sur les tambours, sous forme d’un animal sacré avec un long corps et des écailles semblables à celles des crocodiles.
Sous la dynastie des Lý (1009-1225), le roi Lý Thái Tô décida de transférer la capitale de Hoa Lu (province de Ninh Binh, au Nord) à Hanoï, l’endroit où il dit avoir aperçu un dragon prenant son envol (Thang Long en vietnamien). À cette époque-là, le dragon était décrit comme un animal dont le dos était couvert d’écailles, le corps long et courbé comme un serpent, devenant progressivement plus petit vers la queue. Il avait quatre pieds, chacun doté de trois griffes aiguisées. Il portait fièrement la tête haute, ouvrait largement la gueule, jouant avec une pierre précieuse, et son nez crachait du feu. Sur son front, un motif en forme de S symbolisait la foudre. Le dragon sous la dynastie des Lý était influencé par le bouddhisme.
Sous celle des Trân (1226-1440), son image connut de nombreux changements par rapport à la dynastie précédente. Les Trân ont remporté trois victoires contre les Mongols, ce qui se refléta dans l’image du dragon. Celui-ci présentait deux cornes sur la tête, un corps rond et plein. Son dos ressemblait à une selle de cheval, et sa queue adoptait différentes formes, tantôt droite et aiguë, tantôt en spirale. Les écailles pouvaient être en forme de fleurs rondes ou de traits courbés.
Sous la dynastie des Lê postérieurs (XVe siècle), l’image du dragon était complètement modifiée. Son corps était raccourci, sa tête agrandie avec une crinière flottante à l’arrière. Ses pieds étaient dotés de cinq griffes acérées. Le dragon de la dynastie des Lê postérieurs représentait la puissance féodale.
Pour les dragons de la dynastie des Lê Trung Hung (1533-1789), il n’y eut pas de grands changements. Cependant, l’image du dragon devint plus populaire avec des motifs tels que des petits dragons se rassemblant autour du dragon mère, un dragon chassant sa proie, ou un couple de dragons batifolant joyeusement.
Sous la dynastie des Nguyên (1802-1945), le dragon portait l’image de la souveraineté majestueuse. Il était décrit dans différentes postures : le dragon se cachant derrière des nuages, deux dragons se tournant vers le soleil, vers un chrysanthème, ou encore vers la lettre 寿 (la longévité). La tête du dragon était large, possédant les cornes d’un cerf, un museau de lion, des grandes canines, et des écailles régulières. Les dragons représentant le roi possédaient cinq griffes, tandis que les autres, représentant les mandarins et les nobles, en avaient quatre ou trois.
À la fin de la dynastie des Nguyên, il n’y eut plus de division entre les couches sociales dans la représentation du dragon. Ainsi, celui-ci était représenté sous de multiples postures : le dragon au sein des nuages, les dragons rassemblés, ceux aux trois ou cinq griffes, etc. Le dragon ne conservait pas sa qualité suprême comme auparavant. On l’utilisa pour décorer les monuments architecturaux, dans la peinture, dans la sculpture, avec des valeurs plus populaires.
Les ancêtres ont imaginé le dragon pour manifester leur aspiration à la conquête de la nature et d’eux-mêmes. Au fil du temps, de nombreux changements ont été apportés à cet animal mythique, et il a été utilisé à diverses fins. Cependant, le symbole du dragon est toujours très important dans la culture vietnamienne.
Vân Anh/CVN