En 1543, une jonque chinoise avec trois portugais à bord s’échouait au Sud du Kyûshû, sur l’île de Tanegashima. Six ans plus tard, venant de Goa, débarquait à Kagoshima pour évangéliser le Japon le missionnaire jésuite François Xavier.
Ce furent les premiers contacts entre Japonais et Européens, leur culture et religion. On sait comment l’Eglise catholique, dans son effort de renouveau pour endiguer la religion réformée, et contenir la pression de répandre la religion catholique et romaine. C’était précisément l’époque où les navigateurs, convaincus du fait que la terre est ronde abordaient les continents d’Amérique et d’Inde, dans lesquels s’enfoncèrent à leur suite les représentants de l’Espagne et du Portugal catholique, autant avides de nouvelles terres d’évangélisation que de nouvelles sources de négoces.
Jusque-là avait prévalu en Asie de l’Est un ordre “international” centré sur la dynastie chinoise Ming qui tenait les autres pays, dont le Japon, dans sa mouvance. L’irruption des pays européens en Asie et exerça une influence décisive sur le cours de l’histoire japonaise. Eléments particulièrement significatifs de ce processus: l’introduction des armes à feu et la dissémination du christianisme. Dans la suite et indéfectiblement jusqu’au XVIIe. Siècle, le Japon marcha vers la nation à centralisme étatique renforcé et s’engagea dans des activités commerciales avec les nations du Sud-Est asiatique, mais par le truchement exclusif des “navires au sceau vermillon” (Shuin-sen) c’est- à- dire patenté du bakufu, d’une part, et d’autre part ferma hermétiquement ses frontières au monde extérieur qui frappait à sa porte.

Hémisphère Est peint sur un paravent pliant, qui était également la carte du monde connu (réplique)

Fusils à mèche

Edit impérial de 1407 d’un empereur Ming (chine) envoyé au Shogun Ashikaga Yoshimitsu (réplique)

Armure à plastron faite de deux cuirases de fer. L’introduction des armes à feu modìia la structure de l’armure.
L’Asie de l’Est et le Japon
De tout temps avait prévalu en Asie orientale un ordre international fondé sur l’évidence indiscutable, d’un “Empire du Milieu” centre du monde. L’empereur de Chine considérait par conséquent tous ses voisins comme des “barbares”, certes, mais dont il était sage cependant de s’assurer les bonnes dispositions par des présents cimentant le jeu des alliances diplomatiques.
Ashikaga Yoshimitsu, troisième du nom des shôguns du bakufu de Moromachi s’était vu décerner en 1404 le titre de “Roi du Japon” par l’empereur ming Ying-le. Ce qui, strictement parlant, faisait du Japon un des nombreux pays vasaux dans la mouvance chinoise, mais également que les prérogatives diplomatiques exercées jusqu’alors par la cour impériale étaient remises aux mains de la classe des guerriers qui gouvernait le Japon. Assitôt qu’ils sentirent chanceler le pouvoir du bakufu de Muromachi, les plus puissants des daimyô n’eurent de cesse qu’ils ne fussent approprié ce contrôle diplomatique. Dans la période des Guerres civiles, ces prérogatives diplomatiques du bakufu volèrent en éclat.
Concurrement à ces développement, s’étaient établies des “relations” nippo-coréennes, par le truchement des pirates japonais écumant les côtes chinoises et coréennes, en ce sens que les promoteurs de ces relations furent les chefs pirates, et partant, le bakufu et le daimyô dans le mesure où ils étaient capables de contrôles leur activités, mais aussi les grands temples et sanctuaires.
Armes à feu et unification du pays
Entre le XIV et XVe. Siècle, l’Europe s’inventa les armes à feu à mèche. Les arquebuses, débarquées en 1543 à Tanegashima lors de l’échouage du navire chinois avec des portugais à bord étaient des modèles qui avaient reçu quelques perfectionnement en Asie du Sud-Est, car déjà en Europe les fusils à mèche commençaient à se démocher.
Comme les guerres faisaient rage au Japon à cette époque des “Etats Combattants”, ces armes nouvelles durent intéresser prodigieusement les seigneurs belligérants. L’un d’eux particulièrement pugnace et compétant, Oda Nobunaga, eut tôt fait d’organiser des unités de fusiliers qu’il fit manoeuvrer avec brio pour se faucher la route de l’hégémonie. Assasiné par un subalterne en pleine réalisation de son grand dessein, ce fut son successeur, Toyotomi Hideyoshi, qui réalisa la complète unification du Japon.

Un nambambyôbu, ou “paravent des barbares du Sud” (les Portugais arrivaient en effet par le Sud) montrant les coutumes étranger des Européens abordant le Japon.

Un Shu-in-jô (lettre de course au cachet vermillon) émis en 1605 et autorisant un navire à naviguer “du Japon en Annam” (Le Viet-Nam) (réplique).

Echantillonnage de produits apportés par le commerce outre-mer (reproductions)

Maquette d’un shuin-sen, bâtiment autorisé au commerce outre-mer, aux XVIIe et XVIIe siècles.
Gouvernement shogounal centralisé et commerce
Son succès d’unification rapide et complète du pays fit prendre à Toyôtmi Hideyoshi une ligne diplomatique dure puisqu’elle exigeait la soumision des peuples circonvoisins. Insuffisamment préparé, son projet d’invasion de la Corée se solda par un cuisant échec. Son cuccesseur, Tokugawa leyasu fonda le bakufu d’Edo (Tokyo) et se consacra au redressement économique du pays laissé exsangue par les guerres, tant internes qu’externes, et à la normalisation des relations diplomatiques ruinées par les outrances d’un Toyotomi Hideyoshi.
Comme première mesure, Tokugawa leyasu fait passer sous son contrôle direct le port de Nagasaki pour avoir la haute main sur les échanges avec les portugais qui monopolisent le commerce de la soie brute avec la Chine. Il dynamise également les échanges en invitant des bâtiments chinois, espagnols, hollandais, à venir commercer, déploie une politique de relations cordiales avec les nations d’Asie de l’Est et du Sud-Est, toujours dans l’optique d’établissement d’une égalité des opportunités et des libres échanges commerciaux. Pratiquement cela signifie que pour inciter les bateaux étrangers à venir commercer au Japon, le bakufu de Tokugawa donnait l’assurance de la sécurité et de la liberté d’échanges, en contrepartie il pouvait requérir la réciproque des pays vers lequels appareillaient ses navires porteurs de ses lettres de course au cachet vermillon. Plus tard, le bakufu octroya à un groupe de marchands avec lequel il entretenait des relations privilégiés, le monopole de ce commerce maritime afin d’avoir la mainmise entière à la fois sur les relations diplomatiques et commercialé. Mais dès que le gouvernement subodora que les activités des étrangers, surtout le zèle évangélisateur catholique, il renforça son contrôle dans un premier temps, puis passa purement et simplement à la fermeture du pays, si bien que la Hollande demeura la seule nation occidentale encore autorisée à se présenter au Japon pour commercer, mais par le seul petit guichet laissé ouvert dans le port de Nagasaki.
Le christianisme
Sur les traces de Français Xavier, pendant un demi-siècle environ, c’est animé d’un zèle apostolique sincère et fervent que les missionnaires jésuites abordèrent le Japon. Ils n’apportaient pas que la “bonne parolde”: tout le fonds des connaissances pratiques de l’Occident (astronomie, géographie, géodésie, médecine, art de la navigation, imprimerie), ses us et coutumes, se trouvaient aussi dans leurs malles. Dans un premier temps, Oda Nobunaga et Toyotomi Hideyoshi virent d’un très bon oeil ces activités missionnaires. Puis la crainte de la doctrine du Christ, doublée de celle de la politique colonisatrice du Portugal transparaissant en filigrane dans le missionnariat, fit adopter au gouvernement, en 1588, une politique de freinage. Celle-ci s’accentua avec l’apparition des missionnaires espagnols, à la fin du XVIe. Siècle, car ces derniers ne purent réfréner la rivalité féroce qui les opposait aux Jésuites se trouvant sous la protection directe du Portugal. Il n’en faillant pas tant pour alarmer les Japonnais circonspects en toutes choses: le christianisme fut purement et simplement interdit.
Nguyen Thuy (présenter)