Ces naufrages historiques cachent bien plus que de l’or et des bijoux. De la côte de Namibie à la mer de Chine méridionale, découvrez ces navires qui abritaient des richesses cachées depuis des siècles.
Lorsque le galion espagnol San José coula à proximité de la côte Colombienne en 1708, il transportait plus de 200 tonnes d'argent, d'or et de pierres précieuses brutes. C'est l'un des trésors les plus précieux jamais trouvés dans une épave. PHOTOGRAPHIE DE LOGIC IMAGES, ALAMY
Des éclats de bois émergent du fond sablonneux de la mer et des poissons s'y faufilent. Parmi les planches pourries, les ossements des marins qui ont combattu leurs ennemis ou bravé les tempêtes reposent dans le silence froid de l'océan. Peu de lumière parvient jusqu'ici, mais un œil averti pourrait apercevoir un éclat d'or ou la teinte d'une pierre précieuse, ensevelis avec le temps.
Au fil des années, ces trésors motivèrent des aventuriers à explorer les mers dans l'espoir d'accéder à la richesse.
(En 1989, trois tonnes d'or ont été découvertes dans l'épave du SS Central America de 1857. Regardez la série en trois parties L'or maudit : l'affaire Tommy Thompson, qui sera diffusée le jeudi 19 septembre à 21 heures sur National Geographic, disponible avec Canal+.)
De nos jours, cependant, les règles à respecter pour pouvoir revendiquer ces antiquités sont bien plus compliquées. Les archéologues et les autorités régionales craignent que des pilleurs ne détruisent la structure délicate d'un vieux navire en décomposition. Les pilleurs risquent également de vendre ces artefacts à des particuliers, privant le public de l'occasion unique de découvrir leur histoire et de les voir lors de diverses expositions.
C'est pourquoi les archéologues et les autorités maritimes tentent de préserver ces éléments fragiles du patrimoine culturel.
Quel que soit le propriétaire de l'épave, les objets de valeur découverts lors des naufrages ont battu des records (avec des valeurs se chiffrant en milliards) et ont inspiré les rêveurs du monde entier.
Découvrez une partie des plus gros trésors jamais trouvés sur des épaves, qui montrent pourquoi leur propriété est si contestée et pourquoi ces ruines sous-marines doivent être protégées.
LE SAN JOSÉ DANS LA MER DES CARAÏBES, PRÈS DE LA CÔTE COLOMBIENNE
Souvent appelé l'épave « la plus riche au monde », le galion espagnol San José transportait plus de 200 tonnes d'or, d'argent et de pierres précieuses brutes lorsqu'il coula en 1708 pendant une bataille avec des navires de guerre britanniques.
Les estimations du trésor de ce navire vont de quelques milliards à pas moins de 18 milliards d'euros. Un bon nombre de protagonistes firent valoir leur droit de revendiquer le trésor de l'épave. Parmi ces parties, on trouve : une société de sauvetage basée aux États-Unis, qui prétendait avoir trouvé l'épave en 1982 ; la Colombie, qui prétendait avoir trouvé l'épave à un endroit différent en 2015 ; l'Espagne, qui soutenait être toujours propriétaires du navire, comme ils l'étaient 300 ans plus tôt ; et un groupe d'indigènes boliviens, qui affirmaient que leurs ancêtres avaient été contraints d'extraire des mines une grande partie de l'argent.
Peu importe la vraie valeur du trésor, la loi colombienne dispose que les artefacts ne peuvent être vendus. Le San José et ses mystères sont toujours au fond de la mer, et certains archéologues pensent qu'il serait plus sûr qu'ils y restent.
LE BOM JESUS SUR LA CÔTE SUD DE LA NAMIBIE
En 1008, un géologue recherchait des diamants dans une zone connue pour ses gisements de pierres précieuses. À la place, il trouva autre chose : un lingot de cuivre. Les archéologues trouvèrent ensuite vingt-deux tonnes de lingots de cuivre, utilisés à l'époque pour le commerce des épices, mais également des milliers d'artefacts : plus de 100 défenses d'éléphant, un canon en bronze, des sabres, des astrolabes, des mousquets et une cotte de mailles.
Ils trouvèrent également plus de 2 000 pièces d'or, principalement espagnoles et à l'effigie du roi Ferdinand et de la reine Isabelle, mais aussi des pièces vénitiennes, mauresques, françaises et bien d'autres.
Cette cargaison contribua à identifier le navire comme étant le Bom Jesus, un vaisseau de commerce perdu en 1533 alors qu'il se dirigeait vers l'Inde. Le navire et toute sa cargaison sont restés intouchés pendant près de 500 ans. Il s'agit de loin du plus vieux naufrage jamais découvert sur la côte de l'Afrique sub-saharienne, et c'est aussi le plus précieux.
Les lingots de cuivre ont été parmi les premiers signes de l'épave du Bom Jesus, et plusieurs centaines de ces lingots ont pu être remontés. PHOTOGRAPHIE DE AMY TOENSING, NAT GEO IMAGE COLLECTION
L'archéologue Bruno Werz attend de pouvoir guider un morceau de gréement en bois dans un bassin de conservation rempli d'eau douce. Remonter des trésors aussi rares laisse entrevoir de nouvelles perspectives remarquables sur notre connaissance de l'âge d'or du Portugal. PHOTOGRAPHIE DE AMY TOENSING, NAT GEO IMAGE COLLECTION
L'ÉPAVE DE BELITUNG DANS LA MER DE JAVA AU LARGE DE L'ÎLE DE BELITUNG, EN INDONÉSIE
En 1998, des pêcheurs locaux plongeant à la recherche de concombres de mer découvrirent un bloc de corail dans lequel étaient incrustées des céramiques. Cette découverte s'avéra être un boutre arabe du 9ᵉ siècle rempli de plus de 60 000 objets de la dynastie Tang, fabriqués à la main en or, en argent ou en céramique.
Les céramiques, en particulier, sont un symbole de l'industrie céramique de Changsha, de la dynastie Tang et du commerce de la route de la soie en général. La Chine de l'époque était désireuse d'acheter des textiles fins, des perles, du corail et des bois aromatique en provenance de Perse, d'Afrique de l'Est et d'Inde. Au 9ᵉ siècle, les céramiques chinoises étaient devenues populaires, mais les chameaux n'étaient pas adaptés au transport de ces produits fragiles. Des quantités croissantes de plats et d'assiettes arrivèrent donc par la mer depuis la célèbre « Route de la soie ».
Bien que les marins arabes aient manifestement emprunté cet itinéraire maritime, « il s'agit du premier boutre arabe découvert dans les eaux de l'Asie du Sud-Est », déclara John Guy, conservateur du Metropolitan Museum de New York spécialisé dans l'art de l'Asie du Sud et du Sud-Est, dans un rapport de National Geographic en 2009. L'épave constitue également « le plus riche et le plus important lot d'or et de céramique de la Chine méridionale du début du 9ᵉ siècle jamais découvert en une seule fois ».
L'ÉPAVE DE PALMWOOD DANS LA MER DES WADDEN AU LARGE DU PAYS BAS
Nommée d'après les caisses en bois dur qui contenaient la précieuse cargaison du navire, l'épave de Palmwood renfermait des richesses du monde entier et donnait un aperçu de la vie des élites du 17ᵉ siècle.
De ces boîtes brisées, les plongeurs remontèrent plus de 1 500 artefacts, dont une élégante robe brodée de nœuds d'amour en argent, une délicate robe en damas et une tunique en velours teintée à la cochenille, un pigment de couleur rubis obtenu à partir d'insectes que l'on ne trouve qu'en Amérique. Les chercheurs découvrirent par ailleurs de la vaisselle en argent, un ensemble de produits de toilette de luxe, un tapis persan et une collection internationale de trente-deux livres reliés en cuir datant des 16ᵉ et 17ᵉ siècles.
Bien que les conservateurs aient fort à faire avec les objets récupérés jusqu'à présent dans les fonds marins, la majeure partie de l'épave du Palmwood n'a pas encore été fouillée, enveloppée d'un filet protecteur pour la préserver des courants marins.
Les chercheurs estiment que cette robe de damas retrouvée dans l'épave du Palmwood date des années 1620. Elle reste en excellente condition malgré les siècles passés sous l'océan. PHOTOGRAPHIE DE KAAP SKIL MUSEUM
LE NANHAI N°1 DANS LA MER DE CHINE MÉRIDIONALE AU LARGE DE YANGJIANG, EN CHINE
En 1987, alors que l'on cherchait un navire de la Compagnie néerlandaise des Indes orientales ayant coulé dans les années 1700, la compagnie britannique Maritime Exploration découvrit à la place un vaisseau de commerce intact, mesurant trente mètres de long et datant des années 1100.
Une couche de vase de presque deux mètres d'épaisseur avait préservé sa coque en bois et sa cargaison, comprenant notamment de la porcelaine, des pièces de monnaie de l'époque des Song et des lingots d'argent. Au fil des années, les archéologues récupérèrent des dizaines de milliers d'objets sur le Nanhai n°1, dont 100 artefacts en or et des milliers de pièces de monnaie. Toutefois, la plupart des 60 000 à 80 000 reliques du Nanhai n°1 sont des céramiques datant de l'époque des Song du Sud.
L'épave du Nanhai N°1 incrustée dans les fonds marins avant son sauvetage.
PHOTOGRAPHIE DE MARITIME SILK ROAD MUSEUM GUANGDONG
LE SANTO CRISTO DE BURGOS DANS L'OCÉAN PACIFIQUE AU LARGE DE LA CÔTE DE L'OREGON, AUX ÉTATS-UNIS
Le galion espagnol naviguait des Philippines au Mexique en 1693 lorsqu'il dévia de sa trajectoire et disparut, s'étant très probablement échoué sur ce qu'on appelle aujourd'hui la côte de l'Oregon. Une douzaine de poutres furent retrouvées dans la coque d'un navire qui était en activité à l'époque de la disparition du Santo Cristo, et elles sont aujourd'hui considérés comme des artefacts probables. La cargaison du Santo Cristo comprenait de la soie et de la porcelaine chinoise de grande valeur.
Des blocs de cire d'abeille importés d'Europe s'échouèrent également sur le rivage au cours des siècles qui suivirent le naufrage. De petits fragments de porcelaine bleu et blanc ainsi que de gros morceaux de bois laissèrent aussi supposer qu'une épave se trouvait à proximité, ce qui alimenta les légendes parmi les populations amérindiennes des environs.
À la fin du 19ᵉ siècle, des légendes locales évoquant un galion et son trésor apparaissaient régulièrement dans les pages des journaux de l'Oregon. Ces récits ont attiré l'attention du cinéaste Steven Spielberg et lui ont probablement inspiré l'idée du film Les Goonies (1985), bien qu'il n'ait jamais confirmé le lien.
Un bloc de cire d'abeille provenant du Santo Cristo de Burgos porte la marque distinctive de son propriétaire. PHOTOGRAPHIE DE BALAZS GARDI, NATIONAL GEOGRAPHIC
Les morceaux de porcelaine chinoise de la période Kangxi (1661 -1722) qui s'échouent sur le rivage près de Manzanita sont probablement des restes de la cargaison du galion. PHOTOGRAPHIE DE BALAZS GARDI, NATIONAL GEOGRAPHIC