L’exposition «Hanoï en couleurs, 1914-1917» a été inaugurée le 16 septembre à la Maison des Etudiants de l’Asie du Sud-Est située dans la Cité internationale universitaire de Paris.
Entrant dans le cadre de l’Année France-Vietnam et organisée par l’Institut français à l’initiative d'Emmanuel Poisson, historien à l’Université Paris-Diderot et Dinh Trong Hiêu, ethnologue retraité du CNRS, elle réunit 60 autochromes commandités au photographe français Léon Busy par le banquier et philanthrope Albert Kahn pour ses Archives de la Planète. Il s’agit d’une institution fondée par Albert Kahn lui-même dont le but était de constituer une mémoire iconographique des modes de vie voués à disparaître dans un monde en changement.
Rue des Ferblantiers (ou rue des Étainiers). Photo : Léon Busy/CVN
Cette collection d’anciennes photographies en couleurs fait partie d’un fonds de plus de 1.500 autochromes réalisées il y a un siècle par Léon Busy et conservés au Musée Albert Kahn. Lors du choix des photographies, les organisateurs ont donné la priorité aux images les plus belles, susceptibles d’intéresser les études vietnamiennes et d’apporter un témoignage visuel sur la vie matérielle et culturelle d’il y a un siècle. Certes, d’autres photographes ont laissé des témoignages remarquables sur le Vietnam ancien, mais les autochromes sont bien les premières photographies en couleurs, grâce à l’invention des frères Lumière.
Réalisés à Hanoï de 1914 à 1917, ces clichés en couleurs apportent un témoignage passionnant sur l’ancien Vietnam. La couleur donne à cette iconographie la précision, une dimension non moins importante. Ainsi, connaît-on les coloris des vêtements, le chatoiement de simples jouets d’enfants, voire les teintes des arbres à la saison des fleurs…
Vue de l'intérieur du temple de la Littérature. Photo : Léon Busy/CVN
Par ailleurs, les autochromes de Léon Busy dévoilent plus de 30 ans après la conquête du Tonkin un espace qui n’a pas encore connu les bouleversements dus à la colonisation française, aux guerres dévastatrices, aux changements socio-politiques qui s’ensuivirent, ou tout simplement et surtout à l’urbanisation. Faute de cette jonction par l’image, cet espace risquait de devenir totalement étranger aux Vietnamiens aujourd’hui.
D’autre part, les autochromes de Léon Busy frappent par leur qualité esthétique. Un véritable travail de cadrage, de pose, un savant usage des jeux de lumières font de lui un artiste. Certains de ses clichés sont de véritables œuvres d’art. Deux grands thèmes se dégagent : d’abord les métiers qui n’ont cessé d’animer les rues de Hanoi et les scènes de la vie quotidiennes ; ensuite, les rapports entre l’homme vietnamien et son environnement, à travers l’équilibre des paysages comme dans les nombreuses croyances religieuses.
À la cérémonie du vernissage, Benoît Paumier, Commissaire général de l’Année France-Vietnam 2013-2014, a estimé que l’organisation de cette exposition est un des temps forts de l’Année France-Vietnam. Il s’est réjoui de la présentation de cette collection au public. «Elle constitue un document unique, tant par la qualité exceptionnelle et la beauté des clichés que par sa valeur scientifique, qui en fait un outil précieux pour comprendre la vie rurale et les traditions du Vietnam au début siècle dernier», a-t-il précisé. Il a tenu également à remercier Emmanuel Poisson et Dinh Trong Hiêu pour leur détermination, leur passion et leur talent, avec lesquels ils ont conçu et réalisé cette exposition.
Deux jeunes filles habillées de caches-seins, assises sur le rebord d'une citerne. Photo : Léon Busy/CVN
Pour sa part, le représentant de la région Ile-de-France, Michel Bock, a fait part de sa satisfaction suite aux succès de cette exposition organisée à Hanoi en décembre dernier et sa tenue maintenant à Paris, dans une ville marquée par le dialogue des cultures. «Organisée au moment où l’Ile-de-France et Hanoi marquent le 25e anniversaire de leur coopération, cette exposition permet d’appréhender et de retrouver le passé des Vietnamiens et contribue en même temps au renforcement de l’amitié et de la coopération entre Ile-de-France et Hanoi, deux partenaires qui ont tissé une coopération riche et ancienne», a-t-il souligné.
Pour conclure, on peut citer les termes utilisés par les deux commissaires scientifiques Emmanuel Poisson et Dinh Trong Hiêu dans leur présentation: «La valeur des autochromes de Léon Busy ne réside pas tant dans la sauvegarde d’un patrimoine à jamais disparu, que dans la mise en évidence, sur la terre vietnamienne, un siècle plus tard, de la permanence de bon nombre de ces pratiques» et «cette exposition présentée à Hanoi comme à Paris est une belle contribution à la sensibilisation de tous à la valeur universelle du patrimoine vietnamien».
Bich Hà/CVN